* Le spread Libor-OIS a atteint un plus haut depuis 2009 * Il indique habituellement un stress dans le secteur financier * Mais d'autres facteurs sont cette fois-ci mis en cause * La disponibilité et le coût du financement en dollar évoqués par Blandine Henault PARIS, 27 mars (Reuters) - L'écart entre le taux Libor sur les prêts interbancaires de trois mois et le swap de taux OIS de même échéance en dollar s'est vivement creusé ces derniers mois, un mouvement qui pourrait s'avérer durable même s'il ne traduit pas forcément un stress sur le système bancaire américain, estiment plusieurs intervenants de marché. Le spread Libor-OIS est un indicateur de la bonne santé du secteur financier. Il mesure la prime de risque exigée par une banque pour prêter des liquidités à une autre banque, ce qui permet notamment d'évaluer la probabilité de défaut de la contrepartie bancaire. Cet écart atteint actuellement aux Etats-Unis 58 points de base, soit son plus haut niveau depuis mai 2009, alors qu'il évoluait encore autour de 25 en début d'année. "Sa valeur 'normale' est de moins de 10, au-delà de 50, c'est un indicateur de risque systémique majeur", préviennent les stratèges de Mirabaud Securities. Et de rappeler que ce même spread avait commencé à exploser le 8 mars 2007, en faisant un signe précurseur de la crise des "subprimes" qui allait suivre. Habituellement, le Libor à trois mois évolue de façon corrélée avec le niveau du taux directeur et le swap OIS ("overnight indexed swap"), qui constitue une mesure des anticipations de la politique de taux de la Fed. Mais depuis la fin 2017, le taux Libor en dollar a nettement accéléré, un mouvement qui pour l'heure ne s'est pas transmis aux marchés en euro et en livre sterling. Pour autant, cette nette remontée du spread Libor-OIS aux Etats-Unis mérite d'être nuancée, relèvent plusieurs observateurs. DES FACTEURS TECHNIQUES "Habituellement, la montée de l'écart entre Libor et OIS est liée à une dégradation de la situation économique et financière. Ce n'est pas le cas aujourd'hui", estime Hervé Goulletquer, stratège chez LBPAM. L'indice de la Fed de Chicago sur les conditions financières s'est resserré mais reste relativement accommodant. "L'élargissement du spread Libor-OIS à trois mois n'est probablement pas lié à des craintes sur la qualité de crédit des banques, mais plutôt à des facteurs qui affectent la disponibilité et le coût du financement", estiment ainsi les stratèges de Bank of America-Merrill Lynch (BAML). Premier facteur avancé par plusieurs observateurs: la très nette augmentation des émissions de papiers courts (T-Bills) par le Trésor américain ces dernières semaines. Les analystes de BAML constataient mi-mars que le montant d'obligations émises sur les cinq semaines précédentes avait dépassé le double du montant net des titres adjugés sur l'année 2017. "Cette offre élevée a causé une nette dépréciation des T-Bills face au swap OIS. Cela a conduit à rendre moins chers les autres produits sur le marché monétaire et à forcer les banques à relever leur taux d'emprunt pour attirer des financements", expliquent-ils. L'offre élevée de T-Bills, qui intervient après une récente pénurie, devrait également pousser les fonds monétaires - des acteurs majeurs du financement de l'économie américaine à court terme - à réallouer leurs investissements au détriment des titres privés, ce qui contribue à tendre le marché du crédit. UN MOUVEMENT DURABLE L'élargissement du spread Libor-OIS en dollar peut aussi être liée à un changement de comportement des entreprises américaines en matière de financement en vue du rapatriement prochain de leur trésorerie détenue à l'étranger. Les sociétés ont notamment renforcé leur allocation dans les fonds monétaires afin de maintenir la liquidité de leurs portefeuilles et de se laisser du temps pour réfléchir à l'utilisation du cash rapatrié de l'étranger, expliquent les analystes de BAML. "Les entreprises ont eu tendance à émettre plus de papier court récemment", souligne aussi Stéphane Deo, chez LBPAM, évoquant un attentisme de court terme avant le rapatriement de fonds. "Cela a contribué à mettre de la pression sur la partie courte de la courbe du crédit". La réduction du bilan de la Fed est également citée comme l'un des éléments d'explication de la hausse du taux Libor en dollar. La banque centrale revend actuellement des obligations sur le marché et prélève en contrepartie des liquidités, ce qui réduit les fonds disponibles pour le marché monétaire. Tous ces éléments sont amenés à perdurer, ce qui laisse présager du maintien d'un spread Libor-OIS élevé. "Les tensions sur le financement devraient s'atténuer en avril puisque le Trésor va temporairement réduire ses adjudications, mais nous pensons que les incertitudes sur le marché monétaire ne devraient pas permettre un retracement rapide ou un retour sur les niveaux qui prévalaient au cours de l'automne dernier", préviennent les analystes de BAML. La perspective d'un rapatriement massif de la trésorerie détenue par les entreprises américaines à l'étranger devrait aussi peser sur les conditions de financement jusqu'à la fin de l'année. Selon BAML, les premiers rapatriements devraient intervenir au deuxième trimestre et contribuer à durcir encore le financement de marché en dollar. Sans compter que la réduction du bilan de la Fed devrait se poursuivre et même s'amplifier. UNE INQUIÉTUDE POUR LA FED ? Cet élargissement durable du spread Libor-OIS n'est pas sans conséquence: les difficultés de financement en dollar devraient particulièrement affecter les banques étrangères, comme en témoigne le récent avertissement sur résultats de Deutsche Bank DKKGn.DE , qui intégrait entre autres une augmentation du coût de financement. Le CDS - "credit default swap" ou couverture de défaillance - de General Electric GE.N a triplé depuis le début de l'année, relève également Stéphane Déo, chez LBPAM. "Le mouvement sur GE est un très bon exemple du stress ambiant", indique-t-il, rappelant qu'il avait constitué un signe avant-coureur de la crise de 2008-2009. De quoi inquiéter la Fed ? Pour l'heure, la banque centrale reste sereine et elle ne devrait réagir que si la dégradation des conditions financières se répercute sur les conditions de financement des entreprises ou commence à peser sur leur confiance ainsi que sur celle des ménages, prédit BAML. "La hausse du Libor n'est pas encore suffisante pour faire dérailler la Fed de son cycle de resserrement graduel, mais ses responsables devraient être amenés à être plus attentifs aux conditions financières". <^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^ U.S. Net Treasury Debt issue http://reut.rs/2BYhA2T Le spreat Libor-OIS en dollar se creuse https://reut.rs/2pLtgNS Le spread Libor-OIS au plus haut depuis 2009 https://reut.rs/2IYf6Sx Le taux Libor dollar accélère https://reut.rs/2GfA4uk La remontée du Libor reste confinée au marché dollar https://reut.rs/2pKfJH3 Pas de dégradation économique derrière la hausse du spread Libor-OIS https://reut.rs/2IatxkW L'indice de la Fed de Chicago sur les conditions financières reste accommodant https://reut.rs/2pKBd5O ^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^> (Édité par Marc Joanny)
GRAPHES-Le spread Libor-OIS en dollar se creuse, un signe de stress ?
information fournie par Reuters 28/03/2018 à 15:33
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