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ECLAIRAGE-Le "raid" sur AF-KLM, nouveau chapitre de l'interventionnisme d'Etat
information fournie par Reuters 28/02/2019 à 16:20

    * Les Néerlandais avaient demandé des assurances sur KLM au
nouveau PDG
    * La position du PDG a conduit l'Etat néerlandais à se
renforcer
au capital-sources
    * Un comportement de "raider", selon une source
gouvernementale
française
    * Le gouvernement néerlandais a fait échouer d'autres
opérations
avec des entreprises étrangères

    par Toby Sterling et Tim Hepher
    AMSTERDAM/PARIS, 28 février (Reuters) - Lorsque le nouveau
patron canadien d'Air France-KLM  AIRF.PA  a rencontré des
responsables politiques néerlandais à La Haye le 15 février, il
ne savait pas qu'il ouvrait un nouveau chapitre de
l'interventionnisme d'Etat dans l'aviation européenne.
    Le ministre néerlandais des Finances Wopke Hoekstra avait
convoqué Ben Smith pour s'assurer qu'Air France maintiendrait
les principales routes ouvertes à l'aéroport Schiphol
d'Amsterdam et que KLM, dont la rentabilité éclipse complètement
celle d'Air France, conserverait l'indépendance partielle dont
elle jouissait depuis la fusion des compagnies aériennes en
2004.
    Ben Smith, qui a déclaré aux investisseurs qu'il envisageait
d'améliorer l'intégration des deux compagnies et de réduire les
coûts au sein d'Air France-KLM, s'en est tenu à de brèves
réponses sans engagement, battant rapidement en retraite, selon
une source au fait du dossier.
    Lorsque le gouvernement néerlandais a estimé que ses
demandes n'étaient pas prises en compte, il a décidé d'agir, a
ajouté cette source et une autre personne au fait de la
question, ce qui a conduit à l'annonce, mardi, d'une prise de
participation supplémentaire dans Air France-KLM pour la porter
au même niveau que l'Etat français et pouvoir influencer la
gestion du groupe franco-néerlandais.
    "Acquérir cette participation nous garantit une place à la
table", a déclaré Wopke Hoekstra, ajoutant que son gouvernement
avait déboursé 680 millions d'euros pour acheter 12,7% du
capital du groupe "afin de défendre les intérêts nationaux
néerlandais".
    
    CHANGEMENT RADICAL
    Le gouvernement a par la suite précisé qu'il avait atteint
14% du capital d'AF-KLM, ce qui correspond presque aux 14,3%
détenus par l'Etat français. Un changement de cap stupéfiant,
quinze ans après la fusion d'Air France et de KLM.
    Le ministre français de l'Economie Bruno Le Maire a jugé
cette initiative "incompréhensible" et une source au ministère
des Finances a estimé que "la façon dont cette participation a
été prise rappelle les techniques de raider plutôt que d'Etat
actionnaire".  
    En Bourse, l'action AF-KLM a perdu 12% de sa valeur, les
investisseurs craignant une impasse entre les Etats
actionnaires. Jeudi, le titre abandonnait encore plus de 3% dans
l'après-midi.
    La décision prise par le gouvernement néerlandais traduit un
changement radical dans la politique des Pays-Bas, qui a été le
premier pays à signer le traité de libéralisation Ciel ouvert
(Open Skies) avec les Etats-Unis en 1992.
    Air France-KLM s'est refusé à commenter des négociations
tenues à huis clos. Mais dans un communiqué, le groupe s'est dit
prêt à réaffirmer ses engagements de renforcer KLM et son hub de
Schiphol.
    Quinze ans après la fusion des deux compagnies aériennes,
les fragiles fondations de l'un des rapprochements emblématiques
du transport aérien sont mises en lumière et soulignent la
difficulté de réaliser des opérations transfrontalières,
notamment dans un secteur traditionnellement empreint de fierté
nationale.
    "Les compagnies aériennes sont uniques en leur genre. C'est
peut-être le seul cas où le drapeau national a toute sa
pertinence, au point d'être affiché sur les queues des avions",
a déclaré Giovanni Bisignani, ancien directeur général de l'IATA
(Association internationale du transport aérien).
            
    "L'INTÉRÊT PUBLIC"
    Cependant, les analystes politiques qui ont observé les
gouvernements néerlandais de centre-droit depuis la crise
financière de 2008 n'ont pas été si surpris par la montée de
l'Etat au capital d'AF-KLM : le rachat d'une grande entreprise
nationale comme KLM est impensable à leurs yeux et la fusion de
2004 déplaît aux ministres actuels.
    Les tentatives d'entreprises étrangères d'acheter
l'opérateur télécoms KPN  KPN.AS  en 2013, le groupe postal
PostNL  PTNL.AS  en 2016 et le fabricant de peintures Akzo Nobel
 AKZO.AS  en 2017 ont toutes échoué en partie du fait de
l'hostilité des cabinets du Premier ministre Mark Rutte.
    Le gouvernement néerlandais prépare une loi qui autoriserait
tout conseil d'administration d'entreprise néerlandaise à geler
une offre publique d'achat pendant 250 jours. Il est aussi en
train de mettre sur pied un groupe d'experts chargé d'intervenir
auprès du gouvernement pour lui demander de procéder à des
vérifications en cas de prise de contrôle dans des secteurs
jugés "sensibles", une pratique qui fait écho à celle en vigueur
aux Etats-Unis.
    "L'intérêt public doit primer", a déclaré Lodewijk Asscher,
chef du parti d'opposition travailliste, rejoint sur ce point
par l'ensemble des tendances politiques aux Pays-Bas. La
décision du gouvernement de centre-droit est juste pour
"l'économie, l'emploi et la pérennité" du pays, a-t-il dit.
    La France aussi a dans le passé suscité des critiques pour
avoir tendu de telles embuscades boursières, notamment en 2015
lorsqu'Emmanuel Macron, alors ministre de l'Economie, avait
ordonné une augmentation surprise de la participation de l'Etat
dans le groupe Renault  RENA.PA .
    Outre les sensibilités politiques, les analystes estiment
que si les fusions transfrontalières sont particulièrement
délicates c'est que la plupart des compagnies aériennes sont
également soumises à des restrictions de propriété et aux règles
internationales qui lient individuellement les droits de trafic
aux différents pays.
    
    DIFFÉRENCES CULTURELLES
    Leur fusion ayant provoqué une vague de consolidation en
2004, Air France et KLM ont cherché à résoudre ces problèmes et
à pacifier les puissants syndicats de la compagnie française en
accordant une liberté importante et des bilans séparés aux deux
compagnies. Mais cette stratégie s'est traduite par une
multiplication des strates au niveau de la gestion du groupe et
par des conflits à répétition avec les pilotes français.
    Ce modèle a suscité une frustration croissante du côté
néerlandais, KLM se trouvant entraînée dans le fardeau financier
d'Air France sans véritable contrôle sur le groupe, largement
piloté par les Français, ont souligné les sources.
    En 2018, Air France a réalisé un bénéfice d'exploitation de
266 millions d'euros, contre 1,07 milliard d'euros pour KLM.
    A titre de comparaison, la fusion entre British Airways,
Iberia et Aer Lingus en 2010 a mis en place une holding plus
puissante, IAG  ICAG.L , et s'est dotée d'une structure allégée,
a déclaré James Halstead, du cabinet Aviation Strategy et qui
suit de près le groupe AF-KLM.
    Les différences culturelles ont aussi hanté la fusion
franco-néerlandaise dès le début. "Les Néerlandais sortiraient
d'une réunion en disant que telle ou telle question a été
tranchée", a commenté James Halstead. "Les Français diraient que
cela a seulement été envisagé."

 (Avec Sudip Kar-Gupta et Laurence Frost à Paris, Dominique
Rodriguez pour le service français, édité par Catherine
Mallebay-Vacqueur)
 

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