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Quel impact de la crise du coronavirus sur les fonds en euros ?
information fournie par Le Cercle des analystes indépendants 30/04/2020 à 08:30

François d'Hautefeuille
François d'Hautefeuille

François d'Hautefeuille

Evariste Quant Research

Cofondateur & président

https://www.evariste-quant-research.com/

•    La fin d'un cycle économique et politique a toujours été lié à de grandes instabilités financières favorisant une redistribution des richesses.
•    Nous sommes sans doute à un tel point d'inflexion du cycle financier.
•    Les investisseurs qui sauront comprendre et anticiper ces changements majeurs de paradigme de l'ensemble du système politique, économique, technologique seront les mieux à même à préserver leur patrimoine dans la crise à venir.

Nous pensons qu'il est important pour les investisseurs de réduire leur exposition aux fonds en Euros. Ces fonds sont exposés aux conséquences de la crise coronavirus. Les assureurs offrent des alternatives très attractives en termes de construction de portefeuille.

Pourquoi sortir des fonds en euros ?

La crise du coronavirus va entrainer la plus forte récession de la France depuis 1945. On peut sans doute estimer le coût du confinement à environ 10% du PNB soit plus de 250 Mds EUR. C'est le montant de PNB de la Grèce ou de la Bavière ! Ce coût est financé actuellement par une explosion équivalente du déficit budgétaire, de l'endettement, et aussi peut être de la croissance monétaire via une monétisation de la dette par la BCE.

Ces 250 Mds EUR ont sans doute permis d'éviter la mort d'au moins 60.000 personnes soit une perte de richesse nationale de plus de 4 mln EUR par personne sauvée. On a donc limité un géronticide au prix d'une destruction historique de la richesse nationale.

On peut expliquer via ce genre d'approche purement économique, la rationalité sous-jacente des choix politiques de confinement limité de la Suède ou encore des USA. Le Président Trump a ainsi argumenté que le remède du confinement était parfois pire que le mal de la pandémie. On voit là en tous les cas toute la difficulté éthique et l'ampleur du début actuel sur la sortie du confinement dans la mesure où on a là un arbitrage politique entre protection de la vie de nos seniors et protection de la prospérité de la Nation.

Où en sommes-nous dans la crise financière Coronavirus ?

Certains voient déjà dans le fort rebond des marchés (en particulier du Nasdaq qui a quasiment retrouvé ses niveaux du début de l'année), le signe que la crise n'aura pas un impact majeur. De même, les obligations semblent avoir été peu affectées par la crise.

Cependant, si on regarde derrière les grands indices, on remarque beaucoup de signes de fragilité cachés : les indices small caps restent sur les plus bas et subissent un retard majeur (près de 30% depuis le début de l'année). La hausse des indices USA est concentrée sur les 5 grands GAFAS.

Deuxièmement, on peut de moins en moins exclure un scénario d'Itaxit via une prise du pouvoir de Matteo Salvini vu la déliquescence de l'Italie après 20 ans de stagnation économique (seul pays d'Europe à avoir vu son pouvoir d'achat par habitant stagner depuis 20 ans) et maintenant le taux de mortalité le plus fort d'Europe, le confinement le plus long et en conséquence des menaces de défaut de sa dette qui augmente. Ainsi, la notation de la dette Italienne vient d'être réduite à BBB soit la limite d' «investment grade». Ceci veut dire que la BCE peut se réserver la possibilité de ne plus acheter de la dette Italienne comme elle l'a fait avec la Grèce quand sa dette est tombée à une notation spéculative, laissant ainsi la masse monétaire grecque (et donc son PNB) baisser de 25%. Ceci semble impossible pour la 3e puissance économique de la zone Euro.

Les marchés obligataires mondiaux ont suivi un crash majeur à la mi-mars. Ce crash a été limité par des interventions massives des banques centrales mais montre peut-être la vulnérabilité croissante du marché obligataire face au risque crédit et/ou inflationniste.

Source : Bloomberg, Evariste Quant Research. Bloomberg LP n'est pas responsable de cette analyse.)

Source : Bloomberg, Evariste Quant Research. Bloomberg LP n'est pas responsable de cette analyse.)

Troisièmement, l'approche des élections aux USA va aussi créer une incertitude politique majeure du fait de la polarisation majeure entre Trump et Biden. On est sans doute entré dans une phase de « guerre tiède » entre les Etats-Unis et la Chine, enjeu sans doute majeur des prochaines élections US avec la question de la responsabilité de la Chine (et de l'OMS) dans la propagation mondiale de cette épidémie.

Derrière tout cela, on observe un affrontement croissant entre les partisans d'une démocrature mondialiste sous leadership chinois et technocratiques, et les partisans d'un retour aux valeurs fondatrices des démocraties ancrées sur les principes des Lumières des « Founding Fathers » (pères fondateurs des Etats Unis d'Amériques, qui ont signé la Déclaration d'Indépendance). Tout ceci ressemble de plus en plus au climat délétère des années 30s avec le grand affrontement idéologique et politique entre les démocraties et les empires.

Comment faire payer les rentiers ?

Il va falloir sans doute trouver 250 Mds de financement dans les années qui viennent pour rembourser les coûts de la WWC (world war coronavirus). Qui va payer ? Si on regarde le passé, ce sont souvent les «rentiers» et non pas les entrepreneurs qui doivent payer à partir de la maxime bien connue de Keynes, «il faut ruiner les rentiers pour sauver les entrepreneurs».

On peut anticiper différents mécanismes de transmission de l'épargne des rentiers vers les entrepreneurs

1. Par le défaut. Economiquement, beaucoup de secteurs vont se retrouver de facto en risque de défaut du fait de l'asséchement de leur cash-flow, à commencer par le secteur de l'énergie.

2. Par l'inflation. La masse monétaire M2 des USA a monté de 10% en quelques semaines. Il va se créer un M3 gap (sur-liquidité de l'économie). Historiquement, ceci crée un « inflation gap » qui vient combler à terme la différence entre la sur liquidité du système et sa capacité productive détruite en partie par la crise.

La taille du bilan de la BCE est en train d'augmenter fortement suite à des rachats massifs de dette d'Etat de la zone Euro. Ces liquidités sont ensuite injectées dans les entreprises via des prêts de liquidité. Cette stratégie de « helicopter money » peut créer à terme un risque inflationniste et / ou de défaut via la mise en œuvre des clauses d'action collective sur la dette d'Etat.

(Source : Bloomberg, Evariste Quant Research. Bloomberg LP n'est pas responsable de cette analyse)

(Source : Bloomberg, Evariste Quant Research. Bloomberg LP n'est pas responsable de cette analyse)

3. Par la spoliation. On peut inclure là beaucoup de mécanismes introduits depuis la crise de l'Euro dans la règlementation européenne comme la restructuration de la dette d'Etat (cf. ci-dessous,), la taxe sur les dépôts bancaires (scénario de Chypre en 2011), etc.

Pourquoi revendre les fonds en euros ?

Il est très difficile d'expliquer à un investisseur non averti pourquoi il est urgent de revendre les fonds en euros. De fait, la réponse est souvent la suivante :
1. Je ne risque rien, les fonds en euros sont garantis en capital. Certes, les fonds en Euros bénéficient d'une classification 1 en risque AMF (risque le plus faible). Cependant, une lecture du Document d'Information Commercial d'un fonds en Euro précise bien que la performance sur 8 ans peut bien être à zéro.

2. Je pourrai revendre mes fonds en euro à tout moment. La Loi Sapin 2 peut permettre le « gating » (fermeture à la vente) sur les fonds en euros en cas de risque systémique pour l'assureur (risque de défaut). La Banque de France a à juste titre poussé pour ne pas risquer d'avoir le même scénario qu'en 2008 où la faillite d'une banque (Lehman) avait contaminé l'ensemble du système financier, dégradant fortement les finances publiques des Etats contraints à sauver leurs banques.

3. Les alternatives de placement dont vous me parlez sont à taux négatifs (fonds monétaires). Beaucoup d'investisseurs comprennent rapidement que la perspective future de performance des fonds en euros est très limitée. Ils sont investis en très grande partie en obligations, or ces obligations ont des rendements négatifs.

Il n'est pas besoin d'être un grand finacier ou mathématicien pour comprendre que l'espérance à moyen terme de performance est très faible voire négative. Les assureurs ont été les premiers à prévenir les investisseurs de ces risques. Generali a ainsi restreint la souscription dans ces fonds en Euros dès l'automne dernier. La plupart assureurs ont baissé la rémunération de leurs fonds en Euros en 2019.

4. Si j'avais suivi vos conseils il y a 6 mois, j'aurais eu une performance négative sur un placement alternatif comme les fonds d'allocation d'actifs, les allocations d'actifs actives. Cet argument est très compréhensible. Il est vrai que revendre les fonds en Euros il y a 3 mois pour acheter des fonds monétaires ou d'allocation d'actifs aurait sans doute généré une perte par rapport à avoir conservé ses fonds en Euros.
Ceci est lié au fait que le risque réel des fonds en euros est « caché » via des mécanismes de lissage de la performance via le bilan de l'assureur (provision). Mais en cas de crise majeure, il est possible que ces provisions accumulées ne puissent pas permettre d'encaisser tous les scénarios de baisse.
Les investisseurs français doivent donc réapprendre à investir sur des actifs non linéarisés, et donc à risque apparent (mais pas sous-jacent) supérieur.

5.  Les marchés obligataires et crédit n'ont pas l'air si dangereux, pour l'instant, ils ne baissent pas. La BCE et la FED empêcheront le marché de baisser trop fortement. On a là un argument très difficile à expliquer.
La plupart des investisseurs ont du mal à intégrer que le risque sur les obligations est rare mais important. Contrairement aux actions dont tout investisseur comprend les risques, les risques obligataires et crédits sont sous-estimés car ils arrivent beaucoup plus rarement (pas de grand crash obligataire depuis 1980 sauf la crise de l'euro avec l'Italie et la Grèce en 2011) mais sont souvent très violents. Ainsi, la FED a dû intervenir massivement sur le marché des ETFs obligataires, en particulier municipal bonds, au mois de mars suite à des sorties massives des fonds et ETFs obligataires et crédit.

6. J'ai une garantie de mes placements en assurance vie même en cas de faillite de l'assureur. Certes, les contrats d'assurance vie sont garantis via un dispositif national de garantie, le Fonds de Garantie des Assurances de Personnes (FGAP). Ce dispositif permet une réparation limitée, au global, pour l'ensemble des contrats d'Assurance Vie et de Capitalisation détenus par un même souscripteur, ou bénéficiaire, à hauteur de : 70.000 € pour toute garantie en capital ».

A titre de comparaison, la garantie est de 100.000 EUR sur chaque dépôt bancaire. Elle est encore plus importante sur les comptes titres du fait de la ségrégation des comptes titres par rapport au bilan de la banque. Ainsi, les comptes titres Lehman n'ont pas été impactés par la faillite de cette banque.

7.    Je ne comprends pas comment la loi Sapin 2 peut permettre à un assureur de limiter sa perte sur les fonds en euros, alors que j'ai une garantie en capital dans mon contrat. L'article 21 bis de la loi « Sapin 2 » autorise le Haut conseil de stabilité financière (HCSF), sur proposition du gouverneur de la Banque de France, à limiter ou à bloquer les arbitrages et les retraits des sommes placées sur les assurances-vie, quelles qu'elles soient, en cas de « menace grave et caractérisée » du système financier (et donc notamment en cas de hausse trop brutale des taux d'intérêt). Cf article 49 de la loi codifiée à l'article L631-2-1 du code monétaire et financier. Les retraits seront bloqués pendant 3 mois, renouvelable une fois.

8. La dette d'Etat est sans risque. Là encore, beaucoup d'investisseurs même avisés n'ont pas pris en compte les évolutions des conditions d'émission des emprunts d'Etat de la zone Euro depuis la crise Grecque. De fait, l'Union Européenne a proposé que des Clauses d'Actions Collectives soient intégrées dans les prospectus d'émission de la dette d'Etat des pays de la zone Euro. Ceci veut dire que désormais, une restructuration de la dette d'un Etat est totalement légalement possible (contrairement à la restructuration de la Grèce qui s'est faite sur des fondements juridiques douteux puisque non conformes aux prospectus d'émission et sans participation de la BCE). C'est désormais la « masse » des porteurs des obligations qui va voter pour accepter un défaut éventuel. Quand on sait que du fait du Quantitative Easing, la BCE détient des parts très importantes de certaines obligations, certains analystes se posent la question de savoir si la BCE ne pourrait pas elle-même demander une restructuration le jour où le coût de financement de la dette deviendrait trop important du fait de la crise coronavirus.

9. Comment croire que la France pourrait faire défaut sur sa dette alors qu'elle n'a jamais fait défaut dans le passé. Certes, la garantie de la Dette d'Etat a longtemps été inscrite dans la Constitution à partir de la Grand Charte de Louis XVIII. La France a alors appliqué le principe de Hamilton. Ce Ministre des Finances de Washington s'était opposé à un défaut sur la dette américaine. Ceci faisait suite aux nombreux défauts de la dette d'Ancien Régime qui a été sans doute une des causes majeures de la Révolution.

Mais c'est désormais la notion « Europe Centrale » de dette qui s'est imposée pour l'Euro. Or, contrairement à ce que l'on croit, l'Allemagne et l'Europe Centrale ont une bien plus grande tradition de spoliation sur la dette soit par défaut (comme en 1945 sur la dette nazie) soit par inflation via les manipulations monétaires du Dr Schacht dans les années 30s. Ces manipulations ont certainement aidé Hitler à prendre le pouvoir via la ruine de classes moyennes.

Conclusion

Nous commençons simplement à apercevoir le bilan humain terrible de la crise coronavirus. Mais derrière ces drames humains, on va aussi avoir un coût économique majeur principalement lié non pas à ces décès mais au confinement lui-même.

L'ensemble de la société a déjà sacrifié 10% de sa richesse annuelle pour sauver ses citoyens les plus âgés d'une mort probable. Le Gouvernement a ainsi respecté la Constitution qui affirme que la France protège tous ses citoyens à commencer par les plus faibles.

Mais le « prix du sang « de cette guerre WWC sera comme celui de toutes les autres guerres sans doute une spoliation des rentiers au profit des entrepreneurs au nom de la solidarité nationale.


Cet article est adressé à titre d'information uniquement et ne constitue ni une offre de produits ou de services, ni une offre, une recommandation ou une sollicitation d'offre de fourniture de conseil ou de service d'investissement pour acheter/vendre des instruments financiers.

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